Inspiré de son propre vécu, « Slalom » est un film sans concession mais sans jugement, un regard neutre porté sur deux êtres fascinés l’un par l’autre, habités par une admiration réciproque et incapables de se libérer de l’emprise qui s’est peu à peu installée de chaque côté. Lyz, déterminée à devenir une skieuse de haut niveau s’en remet à Fred, un coach aussi exigeant qu’attentif qui voit en elle un potentiel auquel personne ne semble avoir cru avant lui. Evoquant l’abus de pouvoir ou l’abandon d’un sportif de haut niveau aux mains d’un entraîneur plus âgé, le film de Charlène Favier ne peut que nous rappeler quelques faits d’actualité qui ont défrayé les chroniques ces dernières années et démontrer combien certaines relations dans le monde du sport sont aujourd’hui encore très controversées. Si le corps exulte et cherche à dépasser ses propres limites, l’esprit n’en reste pas moins en alerte et sonne le signal d’alarme lorsqu’inacceptable finit par se produire. Mais n’est-ce pas déjà trop tard ? L’admiration réciproque et la tension palpable qui s’installent progressivement entre deux êtres qui ne peuvent que réprimer leur désir de succès (et de séduction) font de « Slalom » un film fort qui a eu l’intelligence de ne jamais tomber dans le manichéisme ou le jugement. Sublimé par une réalisation minutieuse où les plans rapprochés/larges et les couleurs appuient le message infusé, « Slalom » évoque sans tabou mais avec pudeur, la relation ambigüe qu’entretiennent Fred (Jérémie Renier) et Lyz mais pas seulement… Noée Abita (qui est de tous les plans et nous offre une large palette d’émotions) porte sur ses frêles épaules trompeuses un film où la reconnaissance et le besoin d’exister sont très justement présentés. Slalomant entre les balises d’une adolescence où elle n’a jamais vraiment eu sa place (la faute à l’absence d’un père et l’éloignement géographique de sa mère peu impliquée) et le monde adulte dans lequel elle n’est pas encore véritablement prête d’entrer, Lyz, ce jeune espoir du ski donne tout ce qu’elle peut pour performer dans un sport qui la fait se sentir vivante et constitue un exutoire exigeant. Découvrant des émotions contradictoires la jeune femme se donne corps et âme dans une passion qui la révèle aux yeux de ceux qui l’entourent et l’ont toujours maladroitement aimée. La maturité et la détermination de l’adolescente forcent le respect et confèrent une épaisseur impressionnante à la comédienne pourtant si réservée lors de la séance de Q & A. Outre le tandem interprété avec justesse et empathie par Jérémie Renier et Noée Abita, Charlène Favier nous présente une galerie de personnages secondaires particulièrement bien dessinés, des « référents » qui guident le regard des spectateurs et incarnent les réactions sincères de proches, qui assistant à pareille situation, seraient probablement tout aussi dépassés. Nous emmenant au-delà des situations attendues et nous surprenant par la trajectoire donnée à ses personnages principaux, « Slalom » est un film bienveillant, d’une sincérité remarquable et maîtrisée de bout en bout, un premier long-métrage de grande qualité qui nous poursuit une fois la séance terminée, un film qui prête à réfléchir et qui reste de nombreux jours dans nos esprits bouleversés.
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Si les films (ou les séries) post-apocalyptiques sont aussi fascinant(e)s, c’est probablement parce qu’ils (elles) nous donnent à contempler notre propre reflet, celui de la nature humaine avec ce qu’elle porte en elle de plus sombre. Et si le réalisateur dira à qui veut l’entendre que son film se veut « empli d’espoir », nous n’avons pas vraiment partagé son opinion. Explications… 2085, l’Odyssée de Kalipha Touray En choisissant de mettre le spectateur devant le fait accompli (la Terre de 2085 est un véritable champ de ruines), jamais le réalisateur n’a mis l’accent sur les raisons qui ont conduit à cette tragédie. C’est donc totalement vierge que nous suivons les errances d’un homme (Kalipha Touray) qui se dit être le dernier homme sur Terre se confiant face caméra aux spectateurs que nous sommes. Dans une fresque non chronologique, le réalisateur Jonathan Nossiter prend le pari de fragmenter son récit entre passé et présent et de nous faire partir à la rencontre des « compagnons de route » de notre héros qui cherchera à se rendre à Athènes où serait basée la dernière communauté. Au cours de son voyage, il rencontrera un vieil homme (très convaincant Nick Nolte) qui s’est réfugié dans la cinémathèque de Bologne en Italie et regarde les vieux chefs d’œuvre du Cinéma. Car oui, avec « Last Words », le réalisateur a voulu célébrer la culture à travers le prisme du septième art. De grands classiques sont (re)découverts comme autant de témoignages de la vie d’avant, celle des Hommes, d’avant le Fléau qui s’est abattu sur la Terre. Dans le métrage, la culture y est représentée par de précieux vestiges (des livres ou des pellicules de cinéma) que les personnages font ressurgir de sous les décombres. Et comme si cela ne suffisait pas, le film réussi son pari de marquer les esprits en mettant également en scène de vastes panoramas dévastés où la nature a repris ses droits sur l’humain. Quant aux différentes communautés rencontrées dans le passé du héros, celles-ci sont aussi noires que le charbon et marqueront assurément les esprits du spectateur. Durant près de deux heures, nous sommes comme notre héros, constamment en quête d’espoir que l’on retrouve en nous réfugiant dans la culture du passé. Hélas, il arrive souvent que nous remettions en cause certains choix scénaristiques que nous peinons à trouver pertinents comme certaines personnes âgées qui ne semblent pas se souvenir de leur propre passé. Cet élément associés à plusieurs autres maladresses anecdotiques mais assez présentes que pour nous faire « tiquer » entachent le récit. De plus, certaines scènes allongent inutilement ce dernier, et, on se dit que le film aurait pu être raccourci d’une bonne demi-heure au moins ! Ainsi, la force du propos, intacte au début, tend à s’effilocher avec la longueur de la pellicule utilisée… Pour le reste, soulignons la performance d’autres comédiens venus s’ajouter au casting comme Charlotte Rampling et Stellan Skarsgard (celui-ci provoquera d’ailleurs de belles émotions chez le spectateur !) Ambitieux à défaut d’être totalement maitrisé, « Last Words » se propose de nous conter la fin de l’humanité, avec en corollaire, la perte de ce qui fait de nous des être humains. La noirceur s’invite ainsi au beau milieu des vestiges plus heureux de ce que pouvaient faire les Hommes du temps de leur splendeur. Du propre aveu de son réalisateur, le film est une ode à la culture à travers le cinéma, un film qui marquera les esprits et en cela nous ne pouvons pas donner lui donner tort tant certaines scènes sont fortes en émotions. Néanmoins, pour apprécier ce spectacle, il vous faudra également voyager dans la noirceur des âmes humaines… et ça, c’est assez éprouvant !
Quelques temps après avoir découvert les témoignages de celles qui ont été impliquées dans la tristement célèbre « Affaire Weinstein », la réalisatrice australienne a décidé de donner la parole à des femmes évoluant dans l’ombre, de présenter leur douloureux quotidien où la reconnaissance semble difficilement être accordée. 24 heures dans la vie d’une assistante de production Evoquant le sexisme dans le monde du travail « The assistant » nous fait suivre une journée type de la jeune talentueuse et ambitieuse Jane, réduite à organiser les plannings et satisfaire le moindre besoin matériel d’un producteur de film dont elle est la secrétaire. Ignorée de ses confrères, peu considérée par les femmes venues postuler dans sa boîte et rabaissée par les colères de son patron, Jane se fait piétiner à longueur de journée sans que cela ne puisse susciter une réaction empathique auprès des autres employés. Compétente, frêle et discrète, la jeune femme est confrontée à un milieu sexiste et inhumain, ne trouve aucune écoute et avale ses déconvenues comme des petites bouchées de pain. S’oubliant totalement dans un métier où elle est la première arrivée et la dernière partie, Jane se retrouve face au mur du manque de considération au-dessus duquel elle ne semble pas pouvoir grimper. Interprétée par la très juste Julia Garner (« Sin City », « Ozark »), Jane s’extirpe difficilement de la torpeur qui devient la sienne, de cet enfer répétitif où les journées sont interminables, la reconnaissance aux abonnés absents et les témoignages d’abus de pouvoir éloquents. Relativement muet et lent pour les besoins de son propos, « The assistant » aurait pourtant gagné à être plus direct car sa durée a beau être relative courte, la sensation de léthargie est elle belle et bien présente. Un procédé voulu par sa réalisatrice pour montrer le poids qui pèse sur de nombreuses femmes travaillant dans l'industrie du cinéma et de la télévision, dont elle s’est inspirée pour construire son propre récit. Absent et invisible de l’écran, le patron de la société de production (dont on n’entend que les rires ou les colères) a d’ailleurs un visage universel, une aura toxique qui réduit à peu de choses le moindre de ses collaborateurs, des hommes et des femmes peu loquaces dont les regards en disent pourtant si long et qui pourraient être les employés de n’importe quelle institution. Reposant essentiellement sur la prouesse d’une Julia Garner qui est de tous les plans (séquences), « The assistant » a le mérite de révéler les coulisses d’une réalité, parfois peu considérée et peu à peu évoquée depuis l’air #metoo, de façon discrète mais efficace sur la durée.
D’une infinie poésie mélancolique tant dans les images que dans les mots , le documentaire de Diane-Sara Bouzgarrou et Thomas Jenkoe se découvre avec une infinie tendresse et curiosité, à l’instar d’un album de famille que l’on prendrait plaisir à feuilleter. Succession d’instants figés dans un temps qui passe au ralenti au fin fond d’un Kentucky qui se trouve au point mort, « The last hillbilly » est une jolie réflexion sur la culture et le passé d’une région oubliée de tous... mais pas de ses occupants. Mettant à mal les préjugés et donnant une identité forte à un surnom qui n’a rien de bienveillant (hillbilly pourrait se traduire par le mot « plouc » ou « bouseux »), le récit du quotidien de Brian Ritchie est loin d’être terne et pessimiste.
Formidable éducateur et passeur de valeurs, notre témoin d'exception clame à qui veut l’entendre qu’au contraire des jeunes générations, il se sent privilégié de jouir de tant de libertés. Alors que ses enfants s’enferment dans un monde virtuel, ne comble le temps que par des vidéos regardées sur le net et l’utilisation abusive de leur smartphone (deux médias qui semblent leur ouvrir les portes d’un monde qu’ils ne risquent pas de côtoyer) Brian se réjouit de posséder un lopin de terre, une demeure entourée d’une nature qui à l’image de certains cervidés, viennent mourir dans ces contrées paisibles et abandonnées. Les textes lyriques partagés en voix off, les confidences de ce dernier « péquenaud des collines » sont habités d’une sincérité qui ne peut que nous toucher. Maîtrisant les mots aussi bien que n’importe quel homme de lettres, Brian se livre en pesant chacune de ses idées, interpellant l’homme moderne sur ce qu’il a laissé dériver ou abandonner. En opposant traditions et modernité, « The last Hillbilly » illustre par ses confidences et ses images la perception de plusieurs générations de chômeurs d’une même réalité : l’ennui des enfants qui résument leur journée à marcher et dormir se confronte ainsi à celle d’adultes qui se réjouissent de vivre dans leur sanctuaire familial, une terre en jachère qui n’est pas sans lendemain. L’innocence des enfants que l’on suit le sourire aux lèvres, leur désintérêt ou leur curiosité répondant sans cesse aux (pré)occupations de leurs aînés, les formidables instantanés de vie simple (mais pas simpliste), la beauté de sa photographie et de ses envolées poétiques font du documentaire de Diane-Sara Bouzgarrou et Thomas Jenkoe, un magnifique portait d’un bout d’Amérique, un écho lancé dans l’immensité de la nature qui revient habiter les questionnements intérieurs avec une trop rare authenticité.
Le vrai pouvoir de la presse (étudiante !) Cette « histoire vraie » portée à l’écran par un éblouissant Hugh Jackman dans le rôle de Frank Tassone doit son existence grâce à une enquête journalistique menée par les étudiants du journal estudiantin de Roslyn et colportée directement par le New York Magazine. Cette affaire, véritable tsunami sur la gestion des deniers publics, a fait grand bruit de l’autre côté de l’Atlantique ! Et en regardant le film, nous comprenons mieux pourquoi ! Achetant des belles résidences, des voitures premiums, et des objets de luxe, Frank Tassone et sa complice, Pamela Gluckin (formidable Allison Janney- qui a été oscarisée pour sa prestation dans « Moi, Tonya »), l’administratrice des affaires scolaires, menaient la grande vie grâce aux dotations dont l’école profitait. Réussir à tout prix « Bad Education » ne manque pas de qualités et le moins que l’on puisse dire, c’est que le réalisateur Cory Finley s’est entouré d’un casting de haute volée ! Incarnation d’une réussite professionnelle éclatante, Hugh Jackman est parfait dans son rôle de Frank Tassone ! Cet ancien professeur de littérature, reconverti dans l’administration du lycée de Roslyn marque les esprits par son dynamisme, son sourire « colgate » et une attitude toujours positive. Mais derrière l’impeccable façade qui aurait pu croire que cet homme respecté mettait en place des différentes malversations hautement condamnables ? Mais si le film se montre aussi agréable à regarder, c’est parce son réalisateur et le scénariste Mike Makowsky (d’ailleurs ancien élève de Roslyn) mêlent habilement la vie scolaire avec l’enquête journalistique menée par Rachel, une étudiante de l’école (et joué à l’écran par Geraldine Viswanathan). Aussi, peut-être que le tour de force du film est de provoquer une forme de sympathie chez les spectateurs malgré les évènements qui sont en train de se jouer. Vous l’aurez compris, avec « Bad Education », nous nous retrouvons face à un film captivant à suivre et porté par de brillants comédiens. Dès lors, pourquoi bouderions-nous notre plaisir ?
Basé sur une histoire vraie, « The Professor dans the Madman » relate une histoire surprenante, la rédaction au XIXe siècle du célèbre « Oxford English Dictionnary », ce qui était loin d’être une sinécure ! Le principe ? Répertorier tous les mots utilisés dans la langue anglaise en mettant l’accent sur l’apparition, puis l’évolution des mots à travers le temps, rien que ça ! Devant cette tâche colossale, l’équipe menée par le professeur polyglotte James Murray (épatant Mel Gibson) n’aura d’autre choix que de demander au grand public de participer à l’élaboration dudit dictionnaire en envoyant les mots qu’il connait après avoir parcouru la littérature ancienne et contemporaine. En recoupant les informations transmises, l’équipe du professeur sera en mesure d’avancer beaucoup plus rapidement. Cette adaptation au cinéma de Farhad Safinia, qui œuvrait au scénario d’ « Apocalypto » (de Mel Gibson justement), ne souffre d’aucune critique majeure et conserve naturellement la bonne idée du roman. En effet, parmi les personnes s’engageant à les aider se trouve un certain William Chester Minor (impérial Sean Penn). Interné dans un hôpital psychiatrique, le bon docteur fit, pendant plus de vingt ans, de formidables recherches lexicales qui aideront James Murray. Bien qu’assez traditionnelle dans sa forme, la réalisation du « Professeur et du fou » sert magnifiquement le propos et sublime la relation entre les deux hommes. Le film dépeint très adroitement le respect et l’amitié les unissant, les plans larges succédant aux plans rapprochés en n’oubliant pas de procéder à quelques ralentis nous permettant d’admirer le sourire en coin de Mel Gibson ou ses regards qui en disent toujours beaucoup. Et que dire du jeu de Sean Penn ? En état de grâce, ses crises de paranoïa, ses angoisses et ses absences sont autant de raisons d’apprécier le film ! Parmi les seconds rôles, saluons la performance d’Eddie Marsan (la série « River »), dont le visage et l’attitude semblent coller plus que jamais à cette époque. Finalement, seulement deux éléments ternissent quelque peu ce beau tableau. D’abord, l’intérêt limité de plusieurs personnages sacrifiés (on pense à la famille de Mel Gibson), ensuite des repères peu définis pour comprendre le temps qui s’est écoulé dans cette relation de vingt ans qui unit les deux hommes… Il faut attendre la fin du film et la barbe blanche de Sean Penn pour le mesurer. Dommage… Que retenir de cette belle histoire portée par deux comédiens d’exception ? Assurément la folie de Sean Penn et l’accent écossais de Mel Gibson ! Et quand on sait qu’il a fallu 70 ans de travail pour parvenir à la première version du dictionnaire comprenant vingt tomes et 400.000 définitions, on se dit que même si les deux hommes n’ont pu voir le résultat final, ils ont œuvré pour quelque chose de plus grand qu’eux et qui demeure toujours aujourd’hui.
Se multipliant de façon exponentielle, les nombreux cas d’infections poussent la population à fuir la Corée du Sud (celle du Nord étant jusqu'ici miraculeusement épargnée) pour se réfugier dans des zones plus sécurisées. En route pour le Japon, les rescapés de l’épidémie se retrouvent déviés vers Hong Kong où ils seront confinés durant quatre années… Le décor est installé, le film peut véritablement commencer. Un bateau pour Hong Kong Alors qu’il fuit son pays natal avec la famille de sa sœur, Jeong-seok, militaire de formation, assiste au chaos, à l’abandon, à la désolation et à la multiplication des contaminations. Fonçant droit vers le bateau qui délivrera ses proches du mal redoutable, Jeong-Seok ne sait pas qu’il file vers une autre fatalité, celle d’une extradition forcée et d’un voyage/confinement qui va durablement les marquer. Après l'exil et les méfiances que les Coréens ont subi durant quelques années, Jeong-Seok et son beau-frère se font recruter par une milice qui leur confie une dangereuse mission: retourner à Incheon (situé en Corée) afin de récupérer une cargaison précieuse laissée au pays durant l’exode, une région coréenne qui n’est plus qu’une terre de désolation. En arrivant sur place, notre héros et son équipe constatent, non sans étonnement, que la ville n'est plus que l'ombre d'elle-même et que des humains sont pourtant parvenus à survivre au milieu de ce chaos sans nom… Si le film verse un peu trop dans la démonstration et à tendance à pencher vers le film d’action, délaissant certaines thématiques mieux abordées dans les volets précédents, « Peninsula » garde cependant le cap et développent davantage les idées déjà présentées dans deux métrages totalement indépendants de celui-ci. Sacrifice et abandon, désolation et désir d’aller au bout d’une mission sont toujours au rendez-vous dans cette suite intéressante, un volet qui s'inscrit sans mal dans le décor déjà planté en 2016. Certaines scènes, particulièrement poignantes, ne manquent pas d'ailleurs pas de nous rappeler d’autres rebondissements déjà présentés par le cinéaste dans son diptyque précédent et montrent qu'il est possible de faire rimer zombies et action avec émotions. Toujours cohérent, le scénario de Park Joo-Suk et Yeon Sang-ho se veut moins linéaire et nous permet de croiser des groupes d’individus différents, tantôt sombres, tantôt attachants, ce qui confère au film une dynamique certaine et un développement intelligent de quelques enjeux. Néanmoins, à force de vouloir trop en faire, Yeon Sang Ho oublie de tempérer son spectacle et (ab)use des stratagèmes déjà très exploités dans son « Dernier train pour Busan » beaucoup mieux maîtrisé en termes d’inventivité. Les zombies courent toujours aussi vite qu’Hussein Bolt, leurs intelligences dépassent largement celle des infectés de « Walking Dead » et les fuites en avant gagnent ainsi en intensité, le manichéisme est plus affiché et les obstacles nombreux et parfois trop grossiers. L’humour est aussi plus présent et la confusion des genres, des récits peut déstabiliser une intrigue intéressante mais sacrifiée par l’aspect « blockbuster » d’un film qui, à ne pas en douter, aurait gagné à être plus tempéré. Cependant, rendons à Yeon Sang Ho ce qui lui revient : une direction d’acteurs et une réalisation on ne peut plus appréciables (notre coup de cœur allant vers les deux jeunes comédiennes Lee Re et Lee Ye-won) et une relecture du genre toujours osée et assumée. Grand spectacle plus convenu et plus démonstratif que « Dernier train pour Busan », « Péninsula » reste une suite que l’on appréciera, un film de zombies où les dérives d’une société post-apocalyptique sont particulièrement bien amenée et la tension élevée d’un cran. Un petit plaisir pour les amateurs du genre et pour tous ceux qui ont aimé jadis faire la route vers un Busan à présent dévasté.
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